Portraits d'artistes - Voix

Alex Rosen un Américain à Paris

Alex Rosen Partager sur facebook

Basse américaine aujourd’hui installée en France, Alex Rosen s’est particulièrement illustré dans le répertoire baroque. À Versailles, on peut découvrir le programme de son prochain album construit autour des figures de Thésée et Orphée.

Originaire de Californie, Alex Rosen a fait ses premiers pas de chanteur dans un chœur d’enfants de Los Angeles dédié à l’opéra : « J’y suis resté cinq saisons, ce fut une expérience riche, mais à l’époque ce n’était pas du tout un projet de carrière, c’était une activité parmi d’autres. Au lycée puis à l’université, j’ai continué à chanter sans forcément imaginer que cela deviendrait mon métier. Peu à peu, pourtant, j’ai trouvé ma voix vers la professionnalisation. » Au début de sa formation à la Juilliard School à New York, le chanteur n’imagine pas encore l’importance que va prendre pour lui le répertoire baroque. Une première expérience avec le rôle de Thésée dans Hippolyte et Aricie de Rameau lui permet d’entrevoir toute sa richesse : « Ce fut un rôle décisif dans mon parcours car il m’a fait découvrir un univers d’une profondeur musicale et théâtrale remarquable. Grâce à mes professeurs et à des rencontres essentielles, notamment celle de William Christie, j’ai ensuite approfondi ce répertoire. C’est dans la perspective d’explorer cette voie que j’ai eu envie de m’installer en France. Aujourd’hui, le baroque est l’un des piliers de mon activité, et j’en suis heureux, mais ce n’était pas un plan préétabli. J’ai toujours chanté des répertoires variés et je ne me ferme aucune porte. » C’est notamment le lien entre parole et musique qui intéresse Alex Rosen : « À cette époque, on cherchait à se rapprocher de la déclamation théâtrale. Les récitatifs obéissent à des règles très précises, différentes selon les pays et les périodes. Pour en saisir pleinement le style, l’étude des traités d’époque est indispensable. Les écrits de Rameau sur le sujet me passionnent, ils développent toute une réflexion sur le geste musical et sur l’art de dire le texte, qui nourrit directement mon travail de chanteur. » Ce goût pour le répertoire français va de pair avec une affinité évidente du chanteur pour la langue française : « Pour moi, cette langue fonctionne admirablement bien avec la voix. Paradoxalement, il m’arrive de trouver cela plus simple de chanter en français que de chanter dans ma langue maternelle. Quand on chante dans sa propre langue, on est souvent prisonnier d’automatismes, de réflexes de parole qui peuvent gêner la technique vocale. Avec une langue étrangère, on a plus de distance : on peut analyser les phonèmes, les voyelles, les règles de prononciation, et les intégrer de manière très consciente dans le chant. »

Voyage entre deux mondes

C’est précisément le répertoire français qui fait l’objet du prochain album d’Alex Rosen. On pourra entendre le programme lors du concert à Versailles, où il est accompagné par l’Orchestre de l’Opéra Royal sous la direction de Gaétan Jarry : « C’est à partir d’un air de Thésée qui m’est très cher que ce programme a pris forme. J’ai réfléchi à ce que je souhaitais raconter autour de ce rôle et de l’univers mythologique, qui est omniprésent dans l’opéra baroque. Ce qui m’intéressait avant tout, c’était la relation entre les dieux et les humains. Thésée est une figure fascinante à cet égard : demi-dieu, il entretient des liens à la fois avec son père divin et avec les hommes. Il est un peu entre deux mondes et son voyage aux Enfers traverse l’ensemble du programme. Naturellement, j’ai choisi de faire le parallèle avec le mythe d’Orphée, d’autant plus qu’il a inspiré de très nombreux compositeurs. Au fil du travail, il est devenu évident qu’il n’était pas possible de se limiter à ces seuls mythes, et le projet s’est progressivement élargi à d’autres figures et à d’autres œuvres. » Tout en continuant à s’épanouir dans cette musique ancienne qui lui sied à merveille, Alex Rosen espère explorer de nouvelles terres dans la suite de son parcours : « De nombreux rôles baroques m’attendent encore, notamment chez Händel, mais le répertoire romantique m’attire également : le roi Philippe de Don Carlos est un rôle mythique pour une basse. J’ai aussi une passion pour la comédie musicale, et notamment Sweeney Todd de Sondheim. »

 

Elise Guignard - publié le 01/01/26

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