Valérie Aimard Seule en scène
Forte d’un parcours fait de rencontres musicales déterminantes qui ont contribué à façonner sa personnalité inventive, Valérie Aimard s’attaque une nouvelle fois en deux concerts aux Suites pour violoncelle seul de Bach dont l’enregistrement en 2023, d’une rare humanité, a été salué par la critique.
Au fil des années, préférant le travail en profondeur à l’exposition médiatique, la violoncelliste Valérie Aimard a construit un répertoire considérable qu’elle défend avec détermination : « La découverte de mon instrument a commencé dès l’âge de sept ans chez mes parents à Lyon où j’ai fait la connaissance du violoncelliste Julius Berger. À l’adolescence, outre mon cursus au Conservatoire National Supérieur de Paris, je menais de pair une formation de tennis de haut niveau mais la rencontre en 1992 avec Bernard Greenhouse, membre fondateur du Beaux Arts Trio et disciple de Pablo Casals a été capitale pour moi. Il m’a appris la simplicité, le naturel, et à gérer une technique trop dispersée. » Invitée trois étés de suite au légendaire Festival de Marlboro dans le Vermont, elle entrera en contact avec le compositeur hongrois György Kurtág retrouvé à Paris par hasard et qui lui fera vivre une expérience musicale inoubliable.
Transmettre avant toute chose
Il faudrait aussi citer le pianiste György Sebők dont elle suivra les master class si passionnantes : « J’ai été tout de suite séduite par sa vision artistique et son art de la transmission qui fait aussi partie de mon ADN. Depuis vingt-cinq ans, j’enseigne au Conservatoire du 13e arrondissement à des élèves de tous les niveaux et je m’enrichis sans cesse à leur contact comme au CNSMD de Paris dans la classe de musique de chambre. » Depuis 2020, Valérie s’est lancée dans un projet hors du commun en enregistrant sur son site YouTube « Only Cello », une anthologie de près de deux cents œuvres pour violoncelle seul de 1680 à nos jours : « Ce répertoire m’a toujours attirée. Il y a plus d’un quart de siècle, mon premier disque chez Lyrinx était déjà consacré à la Sonate pour violoncelle seul de Kodaly. Je l’ai d’ailleurs reprise sur mon site et peux passer des week-ends entiers à travailler mon instrument, un violoncelle italien de 1694, sans doute un Grancino, mon alter ego. Il s’adapte à tous les styles, du baroque aux pièces de Guy Reibel en forme d’haïkus écrites à mon intention. » À l’Eglise Saint-Marcel, son intégrale des Suites de Bach aura valeur d’aboutissement : « Je recherche aujourd’hui dans ces partitions plus d’espace, de projection, et je m’attache davantage à des inflexions où l’infiniment petit rejoint l’infiniment grand. » Devenue mime, Valérie porte une admiration sans bornes au mime Marceau dont elle a fréquenté l’école après l’avoir vu à l’Olympia en 2000 : « Il était capable de capter un public par sa seule présence physique et sa concentration. » En décembre, elle sera seule au Théâtre de Nesle dans son spectacle « Bulles », passant de la musique au silence avec la même passion chevillée au corps.
Michel Le Naour - publié le 31/10/24