Portraits d'artistes - Cordes

Thibaut Garcia sur tous les fronts

Thibaut Garcia
Né à Toulouse, disciple de Paul Ferret, Olivier Chassain ou Judicaël Perroy, Thibaut Garcia incarne la nouvelle génération de la guitare classique.
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Jeune virtuose qui ne cesse d’éblouir public et critiques, Thibaut Garcia a construit avec le contre-ténor Philippe Jaroussky un récital voix-guitare hors des sentiers battus. Pendant la vaste tournée qui suit la sortie de leur album, les deux artistes feront une étape au Théâtre des Champs-Élysées.

Pour le musicien français qui multiplie des concerts et des enregistrements aussi exaltants que mûrement réfléchis, la passion de la guitare s’est imposée comme une évidence dès ses plus jeunes années : « J’ai toujours été extrêmement enthousiaste et curieux pour cet instrument. Mon père était guitariste amateur et on entendait toujours de la guitare à la maison, pour le plaisir. Au Conservatoire de Toulouse, les enfants qui commençaient la musique devaient découvrir chaque semaine un instrument différent et faire leur choix à la fin de l’année. C’était obligatoire, mais toutes les semaines je répétais que je voulais jouer de la guitare et pas autre chose. Au bout de six mois j’ai eu gain de cause et on m’a laissé commencer l’instrument. » Et la passion n’était pas seulement dans la pratique mais aussi dans l’écoute : « J’ai écouté énormément de guitare dans mon enfance. J’ai toujours été fasciné par les grandes légendes. Pour moi la plus grande reste Ida Presti. Elle est malheureusement décédée trop jeune, à 42 ans. Pour cette raison elle ne fait pas partie des premiers noms de guitaristes célèbres auxquels on pense. En plus c’est une femme, et les femmes n’ont pas été beaucoup représentées dans l’histoire de la guitare classique. Mais il y a également d’autres figures qui m’inspirent comme Julian Bream, John Williams... Je trouve qu’il est important de réécouter de temps en temps les grands enregistrements, oubliés ou non, car ils peuvent nous nourrir, nous donner des idées nouvelles. On redécouvre des sonorités qu’on n’a plus aujourd’hui. » En termes de répertoire, Thibaut Garcia laisse toutes les possibilités ouvertes : « Je n’ai pas vraiment de répertoire de prédilection, j’aime explorer. On a l’héritage du luth de l’époque baroque qu’on peut s’approprier, puis les répertoires de la guitare romantique et de la guitare moderne… Il m’arrive souvent en récital d’aller de la musique baroque à la musique contemporaine, en passant par le classicisme et le romantisme. Mes envies évoluent beaucoup en fonction des périodes. Tout m’intéresse, mais pour des raisons distinctes, un peu comme chez les gens, qu’on apprécie pour des qualités différentes. »

L’art de l’arrangement

Avec le disque « À sa guitare », Thibaut Garcia se fait le complice de Philippe Jaroussky : « J’ai rencontré Philippe il y a deux ans. Il m’avait appelé pour enregistrer avec lui deux pièces de son album « Passion Jaroussky ». C’est ce que j’adore dans le milieu de la musique, toutes les rencontres qu’on peut faire. Il se trouve que Philippe et moi nous sommes très bien entendus humainement et musicalement. On est devenus amis et on s’est dit qu’on aimerait faire un disque ensemble un jour. Puis la pandémie est arrivée, un an après, et les projets de disques avec orchestre semblaient compromis. On a pensé que c’était peut-être l’occasion de réaliser notre projet, plus simple à monter avec juste guitare et voix. C’est vraiment un rêve qui se réalise. » Les deux artistes interprètent un florilège de mélodies traversant les époques et les cultures. Ils mettent en lumière le raffinement de cette musique, dont ils font une véritable dentelle de mots et de notes grâce à un impressionnant travail d’arrangement (les pièces du programme étant majoritairement écrites pour voix et piano à l’origine) : « La difficulté était de respecter l’écriture des compositeurs tout en trouvant un langage adapté à la guitare. Comment utiliser ses modes de jeu tout en conservant les idées de Poulenc, Schubert ou Fauré ? Je me suis attelé à élaborer plus de la moitié des arrangements, et certains ont demandé de longues recherches. Avec Philippe on a exploré et essayé beaucoup de choses. Quelques essais ont fonctionné dès le départ, d’autres pas du tout. Finalement on a enregistré plus de pièces qu’il n’y en a dans le disque pour garder uniquement ce qu’on pensait être le meilleur. » Comme le précise le musicien, certaines œuvres ont demandé plus de travail que d’autres : « Chaque pièce représentait un challenge différent. Erlkönigde Schubert s’est avéré être le plus gros défi du programme je crois. L’écriture est extrêmement virtuose, et il fallait conserver le tempo voulu par le compositeur. Pour d’autres pièces la difficulté était ailleurs, dans les atmosphères à trouver par exemple, comme pour Septembre de Barbara. À l’inverse, les pièces du programme composées pour luth étaient plus évidentes, parce que l’écriture était plus idiomatique. » Pour les concerts de la tournée, les artistes sont amplifiés pour offrir aux spectateurs la meilleure expérience possible : « On a la chance de travailler avec un ingénieur du son absolument fantastique, Baptiste Chouquet. L'enjeu de la sonorisation était de ne pas dénaturer ce qu’on proposait avec Philippe, mais nous n’avons eu que des bons échos là-dessus au fil des concerts. Certaines personnes ne se rendent même pas compte que le son est amplifié tellement le rendu est naturel. » De très belles perspectives pour le concert au Théâtre des Champs-Élysées !

 

Église Guignard

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